Les élèves volontaires de 4ème, ont récemment plongé dans un monde d’étrangeté, de mystères et de créatures surnaturelles à l’occasion du tout premier concours de nouvelles organisé au collège Saint-François d’Assise. Une aventure littéraire passionnante qui a permis aux élèves de libérer leur imagination, tout en respectant les codes du genre imposé, le fantastique.
Un projet pédagogique pas comme les autres
Lancé par les professeurs de Français, ce concours avait pour but de faire découvrir le genre fantastique de manière ludique et créative. Après avoir étudié des textes classiques et contemporains, les élèves ont eu carte blanche pour écrire leur propre nouvelle. Frissons garantis !
Le défi ? Écrire une histoire où le réel bascule peu à peu dans l’étrange, où le doute s’installe, et où le surnaturel fait irruption dans le quotidien, à la suite des deux premières phrases imposées : « Mon chat l’avait su avant tous les autres. Les yeux plissés, alerte, il épiait la maison entourée d’un jardin en friche que je venais d’acquérir. ».
Fantômes, objets maudits et mondes parallèles
Les jeunes auteurs n’ont pas manqué d’imagination. Chaque texte a su mêler suspense, tension, et parfois même une touche d’humour noir.
Et les gagnants sont…
Après délibération, le jury a tenu a récompensé les 40 candidats. Cinq nouvelles se sont distinguées par leur originalité, la qualité de leur écriture et leur maîtrise du genre.
- Prix de la meilleure nouvelle : Jade LE BRIS
- Prix de la meilleure chute : Linford
- Prix de la meilleure atmosphère : Lucie
- Prix du meilleur style : Elsa
- Prix de la plus grande originalité : Naëlle
Découvrez le texte de la gagnante :
Mon chat l’avait su avant tous les autres. Les yeux plissés, alerte, il épiait la maison entourée d’un jardin en friche que je venais d’acquérir. Elle n’était pas en très bon état, quelques tuiles manquaient, des fenêtres étaient cassées, d’étranges griffures barraient certaines pierres, et l’étendue herbeuse sentait fort le chien, c’était d’ailleurs sûrement cela qui avait mis sur ses gardes mon brave compagnon.
« Bonne chance ! » me dirent les habitants du petit hameau qui m’avaient montré la demeure, avant de repartir. En effet, une superstition locale disant qu’un loup-garou logeait sans permission dans cette habitation en si piteux état. C’était d’ailleurs pour cela qu’il y a quelques mois, je l’ai acheté à son propriétaire qui n’osait plus y aller depuis la création de la légende : pour prouver à tout le monde que l’on ne risquait rien.
C’est sur cette pensée que je sortis mes clefs de ma sacoche mais…avant d’avoir eu le temps de les enfoncer dans la serrure, la porte s’ouvrit brutalement, faisant sursauter mon animal domestique. Dans l’encadrement se trouvait un homme d’au moins deux mètres de haut, d’une barbe d’une vingtaine de centimètres, avec des sourcils en bataille et des sourcils qui formaient deux épis au-dessus de sa tête. Ses petits yeux couleur noisette me fixaient avec une couleur bizarre. Qu’est-ce que cet inconnu faisait chez moi ? En se prenant pour le maître des lieux, et moi comme un homme d’état qui vient réclamer les impôts non payés ? Ou comme un simple facteur venant déposer un colis ? La situation s’éclaircit quand il me dit : « vous êtes le fameux nouveau propriétaire dont j’ai entendu parler ? »
- « Oui, c’est exact. » lui répondis-je sur la défensive.
- « Ah, pardon ! Excusez-moi ! Il y a un ou deux ans, je ne sais plus, je cherchais quelqu’un qui pouvait me loger gratuitement, comme je n’avais pas d’argent. Mais j’ai vu cette maison inhabitée. Je m’étais dit que le propriétaire des lieux devait être en vacances, alors je me suis installé le temps qu’il revienne en pensant lui demander l’aumône.
Mais quelques mois plus tard, il mettait à vendre sa maison sans s’y être approché depuis longtemps et vous voilà ici cinq mois après. Mais entrez, je vous en prie !
J’entrai donc enfin, suivi de mon chat. La période qu’il citait dans son récit coïncidait avec l’histoire de loup-garou de voisin. Certes, l’homme avait un air de chien sauvage, mais pas au point de créer des rumeurs surnaturelles, non ?
Nous discutâmes un peu de manière courtoise, mon brave félin gardant la porte. Je dis que je commençais à avoir faim, et tout-à-coup le comportement de l’étranger changea du tout au tout : il passa de « faux » maître de maison, comme diraient les romains, à serviteur. Il ouvrit la glacière qui lui servait de frigo, et me servit un sorte de saucisson. « Pardonnez-moi, Monsieur, mais c’est tout ce que j’ai. » s’expliqua-t-il.
Je mangeai donc cette viande, malgré le fait que je l’aurais préférée un peu moins sèche. « Il est sûrement en train de me prouver qu’il peut m’être utile, mais je n’ai en aucun cas besoin de serviteurs », pensai-je, « mon adorable chat de garde me suffit ». Je me demandais comment le faire partir sans l’outrer lorsqu’il me demanda soudainement : « La lune est belle ce soir, ne trouvez-vous pas ? «
Je sortis de table pour regarder à travers la fenêtre. La pleine lune était haute, dominant une petite forêt.
« Cette forêt est au hameau ? le questionnai-je en ignorant ses paroles précédentes.
- « Non, Monsieur, elle est encore sur votre terrain. Si vous le permettez, je vous la ferai visiter après votre repas. »
Je finis donc en vitesse mon en-cas qui l’homme qualifiait de « repas », et je le suivis en dehors de la maison, mon compagnon poilu sur les talons.
La fameuse forêt était sombre et lugubre. Je marchais d’un pas hésitant, malgré la rassurance que me procurait la présence de mon super associé à quatre pattes. D’où me venait cette frayeur soudaine ? Était-ce le fait étrange que mon guide connaissait les lieux comme sa poche ? Je ne sus répondre à mes questions intérieures.
Après quelques minutes, l’homme imposant qui éclairait le chemin de sa lampe torche, me dit qu’il devait me laisser un moment pour des besoins urgents. Je me retrouvais donc seul avec mon chat et le hululement d’un hibou. La forêt paraissait d’autant plus terrifiante. Mais tout à coup, un hurlement de loup résonna et me parcourut d’un immense frisson. Quant à mon équipier de fortune, il s’enfuit en courant !
Après un instant d’hésitation, je me lançai à sa poursuite : tant pis si je me perdais, le mystérieux homme me retrouverait ! Malheureusement, mon chat était trop rapide que moi, et je le perdis vite de vue. Essoufflé, j’arrêtai de courir et je me mis à crier : « Marcel ! Reviens ! ». Il me répondit par un miaulement de souffrance.
Songeant que le pauvre félin devait être blessé, je repris ma course effrénée en zigzagant entre les grands arbres. Que lui était-il arrivé dans cette terrible forêt ? Je le trouvai enfin, un centaine de mètres plus loin. Il était au sol, lacéré d’une effrayante griffure, et ne bougeait pas. La peur à son paroxysme, je me mis à le secouer, à le secouer de plus en plus fort en bégayant : « Marcel… Marcel ! Réponds-moi ! » J’allais tenter un massage cardiaque quand soudain, il remua les moustaches : il n’était pas mort !
Je bandais sa griffure avec les moyens du bord, puis je me rendis compte de quelque chose : j’avais l’horrible impression d’être observé. La créature, sûrement un loup soit dit en passant, qui avait blessé mon chat, devait encore être dans les parages. Je regardai dans tous les sens et mes yeux s’arrêtèrent à une ombre plus noire que les autres qui se trouvait derrière un arbre. Derrière cette plante, des yeux de la même couleur que ceux de mon guide me fixaient, appartenant à un monstrueux canidé.
Poussé par la peur, je mis mon animal endormi sur mes épaules et je courrai aussi vite que mes dernières forces me le permettaient. J’entendis la bête derrière moi. « Les loups-garous n’existent pas », répétai-je en boucle sans y croire un mot après ce que j’avais vu. Mais je trébuchai, exténué, et avant de tomber dans les pommes, j’entendis la voix mielleuse de mon guide : « pourquoi cours-tu ? Cela fait longtemps que je vous cherche ! » Puis…
Trou noir. Je me réveillai dans un lit d’hôpital, où l’on me dit que j’étais resté dans le comas pendant deux jours, et que le grand homme qui m’avait amené avait emmené mon chat blessé chez un vétérinaire compétent.
Auteur, Jade Le Bris
Une expérience à renouveler
Face à l’enthousiasme général, ce concours pourrait bien devenir une tradition annuelle. Les élèves ont non seulement développé leur créativité, mais aussi appris à structurer un récit, à manier le suspense, et à jouer avec les émotions du lecteur.

